148 ETOL318
148 ETOL318
2018, Huile sur toile, 60 ✕ 45 cm

Parallaxe

Elisabeth Trenkwalder
du 9 juin 2022
au 13 juillet 2022

Les peintures d’Elisabeth Trenkwalder procèdent d’un déplacement, une route prise à un moment ou à un autre. Elles sont le fruit d’une projection du regard à travers le pare-brise ; elle, assise du côté passager, ne conduit pas ; à loisir son esprit fait l’aller-retour entre l’observation de la masse des nuages qui s’enroule et se déroule à l’horizon, et le ruban de végétation qui fouette la vision sur les bas-côtés.

Ainsi, le ciel n’est pas le véritable enjeu de ces œuvres, mais il en est la référence, le point fixe autour duquel se déploie l’ensemble des mouvements en jeu tout autour. Le ciel, tout à ses inexorables et successives invaginations est un théâtre lointain surplombant de ses drames le passage des voitures sur la route, avec à l’intérieur, autant, sinon plus, d’êtres rivés à la conduite de leur engins.

Dans les rehauts de blanc qui ourlent les masses tantôt déchirées, tantôt enflées s’accorde et se désaccorde la marche du monde. Des ventres se creusent et d’autres explosent, se détachant des uns et des autres des tourbillons d’infinis ciels de jour ou de nuit. Spectateur, on y assiste de loin. Passant sous leurs brassées d’écumes, si nombreux, en camions, en voitures de tourisme, en autocars, qu’irrigue le paysage de nos déplacements rectilignes.

C’est cette double pulsation qui se joue dans les tableaux d’Elisabeth Trenkwalder ; l’une pleine de souffle et puissamment renouvelée, l’autre ponctuant l’espace comme le tic-tac d’une horloge déréglée.

Toute l’étrangeté de ces tableaux tient au fait qu’en tant qu’observateur nous sommes liés à ce tic-tac. Du reste, l’artiste ne s’en cache pas non plus, elle n’aurait pu réaliser ces vues si elle n’avait pas pris de photos à bord d’une auto. Elle fait de nous le témoin assisté de ses rêveries célestes. Le pare-brise est cette fenêtre ouverte sur un monde qui nous échappe et que nous poussons à son emballement par le fait même que cette fenêtre existe. À travers elle, le regard ajuste et réajuste sa perception des mouvements. Il les combine pour créer une forme de profondeur, un après et un avant dont la relativité donne parfois le vertige. La partie est entamée aurait dit Pascal, il faut faire ses jeux.