Ina Van Zyl
Les peintures d’Ina van Zyl ne représentent qu’un objet à la fois. Ils sont posé là, simplement, tel quels, offrant au regard une vision sans compromis ni échappatoire. Pour autant, rien en eux n’est neutre. Le sujet n’est pas la banalité dans sa dimension froide et explicative, tout au contraire, Ina van Zyl s’applique à rendre audible l’intime tension entre la dimension abstraite et significative de ses sujets.
Ce qui anime le choix de l’artiste c’est la contradiction intérieure aux formes, leur dimension politique. Ainsi, celles-ci sont soigneusement choisies, on y croise des extrémités de corps, pieds aux ongles finement manucurés, sexes masculins béants de désir, mains abandonnées, têtes, mais aussi des fruits, des paysages et quelques objets témoignant d’une atmosphère de fin de journée d’été, sans fraîcheur et où la demie obscurité qui s’attarde laisse trainer sur les corps et le monde alentour un aspect de moiteur qui s’ennuie. Las, cette lumière donne à ce qu’elle touche une couleur à la fois sensuelles et vénéneuse, quelque chose d’éminemment tactile, doux et finissant.
Dans ce travail le cadrage est particulièrement important. Resserré, il concentre l’attention dans une proximité presque gênante. Regarder un tableau d’Ina van Zyl c’est ce trouver nez à nez avec des objets dont les sujets les dépassent. Leur extrême impudeur trouble d’autant plus que la lumière sculpturale les fait apparaître dans leur plus simple appareil. Baignés de verts maussades, de bleus électriques, d’ocre et de couleurs de terre éteintes, l’artiste les montre dans ce qu’ils ont de tendre, de fragile et d’écrasant.
Ce traitement, elle n’hésite pas à l’appliquer à son propre visage. Les autoportraits sont fréquents dans son œuvre. Elle livre à son regard la même acuité jouissive qui la pousse à décortiquer la légère asymétrie d’un branchage portant des bourgeons, rendant palpable la polysémie des formes, des interprétations et des pulsions qui parcourent l’épiderme.
Texte de Benoît Blanchard